Depuis le samedi 15 avril dernier, des centaines de civils ont perdu la vie dans de violents affrontements entre l’armée, fidèle au général Abdel Fattah al-Burhane, au pouvoir depuis le coup d’État d’octobre 2021 et les Forces de soutien rapide (FSR), menées par Mohamed Hamdane Daglo, dit « Hemedti ». Il faut souligner ici que lors du putsch en octobre 2021, Hemedti et le général Burhane avaient fait front commun pour évincer les civils du pouvoir.
Ce scénario du pire était redouté par la communauté internationale et de nombreux Soudanais, tant les relations entre les deux hommes forts du régime se sont dégradées ces derniers mois sur fond de luttes de pouvoir et de rivalités pour l’accaparement des ressources. Mais la goutte d’eau qui aurait fait déborder le vase concerne une réforme de l’appareil sécuritaire prévoyant l’intégration des FSR dans l’armée régulière dans le cadre de l’accord de transition vers la démocratie. Le chef redouté des FSR tient en effet à l’indépendance de « son armée » qui sert ses intérêts et ses ambitions politiques. Après avoir évincé les civils du pouvoir avec le général Burhane, « Hemedti » pourrait bien désormais vouloir déloger l’armée qui dirige le pays depuis l’indépendance. « Hemedti veut s’affranchir complètement de l’institution militaire et de la tutelle de l’homme fort de l’armée, le général Burhane qui nourrit des ambitions présidentielles », estime sur l’antenne de France 24 Hasni Abidi, directeur du Centre d’études sur le monde arabe (Cermam). Sans surprise, le chef des armées a décrété, la dissolution des FSR, désormais considérées comme rebelles.
Cette crise vient remettre à l’ordre du jour la question de la privatisation de la sécurité en Afrique. En effet, face à la fébrilité des dispositifs de défense des Etats africains, le recours aux acteurs privés semble s’accroitre sur le continent en dépit d’un véritable encadrement capable de garantir l’allégeance de ces forces. La crise soudanaise interpelle donc les dirigeants africains sur la nécessité de maturer dorénavant les alliances de circonstance qu’ils contractent dans le but égoïste de conserver leur pouvoir.