Les intérêts géopolitiques de l’Italie dans la crise malienne
Domains: Géopolitique
Regions: Afrique de l’Ouest
Nations: Mali

Rome conserve un agenda caché dans sa médiation ou sa diplomatie d’apaisement entre l’Etat malien et les groupes rebelles du Nord. Sous couvert d’un travail consistant à construire des ponts, pour la stabilité, le développement et la sécurité du peuple malien, l’Italie veut structurer le facteur migratoire dans la crise qui sévit dans le pays. Cette attitude de l’Italie intervient dans un contexte où de désengagement de la plupart des pays occidentaux et d’isolation du Mali. L’Italie poursuit quant à elle sa coopération avec le Mali, en construisant une chancellerie à Bamako en 2021 et en renforçant sa coopération sécuritaire avec le pays, à travers le déploiement des forces spéciales italiennes au sein de la « Task Force Takuba » européenne, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme en général et des groupes armés indépendantistes et djihadistes, des régions septentrionales du Mali.

En outre, l’ONG italienne « Ara Pacis Initiatives for Peace » constitue le bras séculier de Rome au Mali en matière humanitaire et de médiation. Cette ONG travaille et les autorités italiennes, pour :

– Le fonctionnement du « cadre stratégique permanent » (CSP) ;

– L’accélération de la mise en œuvre de l’accord de paix d’Alger, ratifié en 2015, entre l’Etat malien et les anciens rebelles ;

– Et particulièrement, le renforcement de la lutte contre l’immigration irrégulière ou clandestine.

Ce dernier point va fonder la mise sur pied d’un partenariat de lutte contre l’immigration clandestine, dont l’Italie serait une priorité essentielle comme principale porte d’entrée des migrants subsahariens. Cela, compte tenu du fait que le désert du Nord du Mali est l’un des itinéraires les plus empruntés par les ressortissants africains migrant vers l’Europe. Bien plus, l’immigration n’arrête pas de s’accroître, allant du simple au double entre 2020 et 2021 avec, selon l’organisation internationale pour les migrations (OIM), plus de 67 000 nouveaux migrants. En effet, chaque acteur peut trouver son intérêt dans le cadre de l’émergence d’un nouvel accord de sécurité :

– L’Italie veut placer CSP au cœur de la lutte contre la crise migratoire ;

– Les groupes armés du Nord y voient une aubaine de financement de leur union comme acteurs proches des passeurs ;

– Les autorités maliennes y voient un moyen de sortir de l’accord de paix de Alger et de se débarrasser des pressions du multilatéralisme mondial (ONU, Union européenne et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest).

Cependant, pour les groupes armés et les autorités maliennes, la crise migratoire subsaharienne semble embarrassante, à cause du déficit des centres de détention de migrants et du manque de transparence de l’argent versé dans le CSP.

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